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25 janvier 2012

Les guerres de religion en vallée de Barétous

Les guerres de religion au XVIIe siècle touchèrent toute la France, mais jetons un regard particulier sur ce qu’elles furent dans le berceau béarnais des PAUSAT.

Au cours du XVI siècle, lassée par les « coupables dérèglements » de l’Église, une partie non négligeable de la population européenne se tourne vers le protestantisme, au culte dépouillé, sinon austère, privilégiant la foi et la prière.
En France, à partir de 1517, les idées luthériennes se sont propagées touchant en priorité la noblesse (le protestantisme, religion propagée par les livres, a eu peu d'audience auprès des paysans et du menu peuple urbain) et vont entraîner durant 40 ans une guerre civile continue.
C’est à cette époque, qu’en 1562, après la mort de son mari, Jeanne III d’Albret, mère du futur roi de France Henri IV, fit du Béarn un État protestant d’où elle avait chassé les catholiques dès 1564 en interdisant l’exercice et les manifestations de leur culte. Les ecclésiastiques qui ne se convertirent pas, durent s’exiler.
Catherine de Médicis, alors Reine de France, envoie Antoine de Lomagne, le Baron de Terride en 1569 pour y rétablir le catholicisme. Ce dernier établit un siège devant Navarrenx, mais Jeanne d’Albret appela au secours le Comte de Mongommery qui leva une armée protestante qui regagna le Béarn et obligea les catholiques à se replier sur Orthez où une bataille sanglante fit rage que les catholiques perdirent et où, 6 de leurs chefs furent amenés à Navarrenx, puis exécutés. Le Béarn resta donc protestant.
Comment ramener les hérétiques à la foi catholique
En 1598, l’Édit de Nantes signé par Henri IV assure aux protestants le libre exercice du culte dans les villes où il était pratiqué avant 1597 et le libre accès à tous les emplois. Mais à cette date, le nombre de ces derniers a diminué de moitié, celle restante est concentrée dans le Sud de la France où se concentrent plus de 80 % des fidèles.
Le Béarn est alors l’un des noyaux de cette religion en France, mais sa primauté y est en réalité fragile, seulement 15% environ des béarnais étaient acquis à la Réforme. Les circonstances politiques préservèrent cette primauté jusqu’en 1599 ; mais par exemple, dès 1594, les députés de la vallée de Barétous demandaient aux États la restauration du catholicisme.
Le berceau béarnais et carte du protestantisme en Europe
Malgré la liberté accordée aux protestants par l’Édit de Nantes, la répression durera cependant pendant tout le XVIIe siècle. En 1622, le roi Louis XIII mena une expédition en Béarn pour imposer sa stricte application.
Dans la vallée de Barétous, c’est-à-dire au cœur du berceau béarnais des PAUSAT, le village d’Arette reste catholique autour de François de Béarn, malgré la tentative d’en faire le centre de la nouvelle « église recueillie ». Les deux autres maisons nobles importantes de la vallée, Lanne avec Marie de Colomer, titulaire de la domenjadure[1] et Aramits dont le chef, Pierre, est un des fidèles de Jeanne d’Albret, sont passés à la Réforme.
Le seigneur d’Issor, Gaston, laisse faire la nouvelle religion qui s’y implante avec vigueur (28 familles protestantes ; en 1665, on compte 123 religionnaires pour 470 catholiques). Lorsque l’échec d’Arette sera patent, le ministre s’installera à Issor, puis devra l’abandonner pour Osse.
En 1661, le curé de Moncayolle, Bernard de Goyheneche, soulève le peuple. Surnommé Matalas, il devient intolérant envers les Réformés. Á la tête de quelques 3 000 hommes, il se rend à Montory où il fait régner la terreur, contraignant 15 chefs de famille à se rendre à l'église, une torche à la main et à jurer de vivre dans la foi catholique, les menaçant pour les convaincre, de brûler leurs maisons.
Le maire d’Issor, M. Jean-Jacques CAZAURANG[2], m’a confié qu’à cette époque, la population de sa commune était divisée en deux groupes, les partisans de la foi catholique vivant sur la rive droite du gave de Lourdios qui traverse le village et ceux de la Réforme sur la rive gauche !
A priori, les PAUSAT identifiés à ce jour sont « officiellement » catholiques, mais ceci est a nuancer, étant donné que mes recherches n’ont été entreprises que dans les registres de l’église catholique, ce qui expliquerait en grande partie cette situation. Notons que le lieu-dit « PAUZAT » se situe en amont d’Issor, sur la rive droite.

Avec la révocation définitive de l’édit de Nantes en 1685, le pouvoir feint de croire à la conversion massive des protestants. La religion est en principe tolérée, mais les pasteurs doivent se convertir ou s’exiler. Les fidèles eux, n’ont pas le droit à l’exil, afin d’éviter les départs d’artisans à l’étranger, la sanction qui leur est réservée sera la peine de mort et la confiscation de leurs biens, commuée en peine de galères à perpétuité.
Les moyens de persécution des protestants
C’est dans ce contexte « qu’une vingtaine de béarnais condamnés partirent pour Marseille, port d’attache principal. Habillés d’une camisole et d’un bonnet rouges, les fers aux pieds, ils ramaient sans ménagement du printemps à l’automne ».
La répression, dirigée en Béarn par  l’intendant Nicolas Foucault, se traduit par la fermeture de 15 temples sur 20, le stationnement de troupes dans certaines villes, le logement de celles-ci chez les protestants[3], les campagnes massives de conversion, la restriction de la liberté de mouvement des pasteurs, et enfin les contrôles sévères à la frontière avec l’Espagne (Somport, St-Jean Pied de Port).

 Les résultats actuels de mes recherches, circonscrits aux registres catholiques fournissent un nombre d’environ 50 individus ayant vécus en Béarn durant cette période. Le début des recherches du côté protestant n’a pour le moment rien donné. Mais cette recherche sera plus difficile, et certainement limitée quant à ses résultats, les registres protestants ayant pour la plupart disparus.


[1] une Domendajure est une terre noble sans maison fortifiée : ll y avait en Béarn au moyen-âge une catégorie "socioprofessionnelle" spéciale : les domengers. La Domenjadure ou « Domecq » était avant tout une maison noble dans le sens premier d' « affranchi du servage » , franche d’imposition. préfigurant la terre seigneuriale. Par exemple, la seigneurie d'Athos était une simple Domenjadure, qui avait comme privilège le péage du bac traversant le gave.
[2] M. Jean-Jacques CAZAURANG est le promoteur et corédacteur de l’ouvrage « BARÉTOUS ». C’est dans ce dernier, dans la partie traitant de l’histoire de la vallée que j’ai trouvé certaines informations citées dans cet article.
[3] En 1681, Louis XIV décide d'en finir avec « l'hérésie de Calvin ». Il envoie des régiments de soldats, les "dragons" chargés d'obtenir, par la persuasion en principe, mais en réalité par tous les moyens qu'ils jugeront bons, l'abjuration de l'hérésie.
Le procédé est simple : munis d'un billet de logement, les dragons, hommes et chevaux, se présentent chez les personnes que l'on sait acquises aux idées « pernicieuses » (la foi évangélique) et qui sont d'ailleurs souvent dénoncées par le curé lui-même. Le logeur doit alors héberger cavaliers et montures, les nourrir et de surcroît leur verser chaque jour une somme d'argent.
Le résultat des dragons missionnaires est immédiat : en quelques semaines on obtient ainsi des dizaines de milliers de conversions au catholicisme.







11 janvier 2012

Existe-t-il des berceaux « PAUZAT / PAUSAT » hors les frontières occitanes ?

J’avais émis l’hypothèse dans ce blog (en septembre 2010) qu’au Moyen-âge, lors de la création des « surnoms », notre patronyme avait dû naître simultanément en plusieurs endroits et créer ainsi ce que j’ai appelé des berceaux[1].
D’où, vers le 11e ou le 12e siècle, selon le contexte (métier, trait de caractère ou physique, lieu géographique, etc.), un individu s’est trouvé désigné par ses voisins d’un surnom (issu du langage parlé) qui deviendra ensuite le patronyme de ses descendants, orthographié plus au moins exactement, au gré de chaque rédacteur de document[2] (le titulaire étant presque toujours analphabète et ne pouvant ni l’épeler ni en vérifier l’orthographe).

Pour notre patronyme, les berceaux identifiés jusqu’à ce jour se situaient tous en Occitanie (Provence, Guyenne, Languedoc, Limousin et Béarn) donc, issus d’un territoire où l’occitan, sous ses différentes formes (provençal, gascon, languedocien, auvergnat, limousin), était la langue usitée. Nous avons donc eu des écritures de notre surnom dépendantes de cette langue et toutes issues des déclinaisons du verbe PAUSAR[3].
En général, l’écriture de ce dernier est dérivée de l’utilisation du participe présent : PAUSAT, avec la terminaison en AT. On trouve cette écriture dans tous les berceaux précités.
Plus rarement[4] et récemment, nous avons constaté l’écriture PAUSA que l’on trouve en Limousin, mais aussi au centre de l’Espagne (Ciudad Real) et en Catalogne (Barcelone, Bañoles, Llers). Ce qui démontre la filiation de ces surnoms avec les langues romanes (ou aussi appelées Latines).

Ainsi, la possibilité de l’attribution d’un surnom à un individu, existant en théorie pour toutes les populations de la planète et donc, n’étant pas circonscrite à un seul territoire et encore moins à un seul berceau, il est normal « qu’une même cause provoquant les mêmes effets », l’on retrouve ces surnoms dans plusieurs pays.
Par exemple, dans le cas d’un surnom lié à la pratique d’un métier, on trouve pour celui de tailleur : TAILOR en Angleterre, SASTRE en Espagne, SCHNEIDER en Allemagne, etc.
Si l’on se circonscrit à une écriture sinon identique, du moins semblable, il faut s’en tenir aux territoires dont les langues parlées étaient voisines. Ainsi, pour un individu surnommé PAUSAT ou PAUSA, parce qu’il avait l’habitude de faire des pauses durant son travail ou avait un caractère flegmatique, son surnom traduira cet état, mais ne sera écrite sous cette forme que dans les territoires où l’on parle les langues romanes.
Carte des berceaux recensés à ce jour dans les territoires de langues romanes

Partant de ce principe, en cherchant les langues appartenant à la même famille que l’occitan[5], on devrait trouver des berceaux supplémentaires de notre patronyme dans des régions où ces langues étaient parlées, c’est-à-dire le castillan, le catalan, l’aragonais, etc. (voir la carte ci-dessus).
La réponse à la question : « existe-t-il des PAUSAT/PAUSA hors les frontières occitanes ? » est donc affirmative. Les premières recherches ont permis de trouver des PAUSA en Catalogne (le catalan est dérivé du provençal) et aussi au nord de Madrid. Voir l’acte ci-dessous :
Acte de baptême en 1675 de Martina Pera PAUSA, village de Bañoles

En conclusion, il est probable que l’on trouvera ces patronymes là où on les cherchera … à condition, que cela soit dans les frontières précitées. Remarquons que nous ne pouvons pas écarter l’hypothèse d’un PAUSAT ayant quitté son berceau pour en créer un autre. Cette hypothèse est aussi à prendre en considération, sachant que nous ne connaîtrons jamais ce qui s’est passé entre le moment de l’introduction des surnoms et leurs premières transcriptions écrites au 16e siècle. Nos ancêtres eurent la possibilité durant ces siècles de se déplacer sur des distances importantes, l’ont-ils utilisée ?


[1] Nous entendrons ici par "berceau" (et par extension, le groupe d'individus qui en est issu, même après l'avoir quitté), l'endroit où, à une période donnée de l'histoire de notre civilisation, un individu et, par là même, sa famille, s'est vu attribué par son voisinage le surnom qui allait permettre de le distinguer de tous ceux qui possédaient le même prénom.
[2] principalement le notaire pour les testaments, le curé pour les baptêmes, mariages et décès
[3] L’origine du substantif « pause » vient du latin « pausa » (en grec « pausis »), signifiant une pause, une suspension provisoire d’une action. Cette origine a été reprise en occitan et la conjugaison du verbe correspondant « pausar » a donné « pausat » au participe présent et plus tard l’écriture phonique « pauzat ».
[4] Comme l’on ne trouve, en général, que ce que l’on cherche et inversement, il est probable que dans la réalité, ayant négligé l’écriture PAUSA, celle-ci soit sans doute plus répandue que ce que j’ai trouvé à ce jour.
[5] Langue indo-européenne appartenant au groupe roman (ce dernier étant dérivé du latin vulgaire, c'est-à-dire de la forme de latin véhiculaire utilisée pour la communication de tous les jours, parlé entre le 5e et le 10e siècle).