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17 août 2015

Un gascon, contemporain de St-Louis, dénommé Élie Pausat.

Le hasard des recherches de nos ancêtres me fit découvrir récemment un individu ayant vécu en Gascogne sous le règne de Louis IX, dit St-Louis, au XIIIe siècle. Or à cette époque la Gascogne était sous domination anglaise et c’est grâce à celle-ci qu’Élie Pausat est parvenu jusqu’à nous.

En effet, son nom apparait dans un manuscrit anglais faisant partie des Rôles gascons que l’administration royale anglaise établissait, en répertoriant un grand nombre d’affaires et mentionnant beaucoup de personnes et de lieux.


Ces documents, autre fois déposés à la Tour de Londres, sont des membranes de parchemin, cousues bout à bout et enroulées sur plusieurs mètres de long. Ils constituaient, au Moyen Âge, un système d’archivage de copies des actes du roi d’Angleterre concernant son duché de Gascogne.
Les Rôles gascons constituent, donc, une source précieuse d’informations puisqu’ils consignent les copies de tous les  mandements pris par la chancellerie anglaise. On y trouve, parmi les ordonnances officielles, des ordres de mobilisation de l’armée, de levées d’impôts, et différents mandements adressés aux sénéchaux, officiers, seigneurs locaux, communautés.
Signalons que tout ceci n’aurait jamais existé sans Aliénor d’Aquitaine, devenue l’héritière du duché du même nom à la mort de son frère Guillaume Aigret, en 1130. Ceci lui permettra de devenir d’abord reine de France, s’étant mariée à Louis VII. Puis son mariage ayant été annulé par l’église[1], elle épousera en seconde noce Henri II Plantagenet[2] qui deviendra quelque temps après roi d’Angleterre. C’est ainsi que la Gascogne fut rattachée à ce pays, faisant partie de la « corbeille de mariage »[3].



Elye Pausat est cité en 1255 dans un Rôle, rédigé en latin, qui déclare que : 
« Petro Artaudi, burgensi de Sancto Emilyano, salutem. Mandamus tibi quatinus sine dilaciones solvas Elye Pausat. Xiij. Libras et .v. solidos burdegalensium, in quibus ei tenemur pro tribus doliis vini ad expensas …. Et Amalvino Iterii .x. libras burdegalensium pro duobus doliis vini, et Petro Vitalis .xiij. libras pro duobus vini », 
et dont le contenu signifie approximativement[4] ceci : 
« Pierre Artaud, bourgeois de Saint-Émilion vous salue. Nous vous mandatons, pour que dans les plus brefs délais, soient réclamés à Élie PAUSAT douze livres et cinq shillings qu’il est tenus de payer pour les frais correspondant à trois tonneaux de vin de Bordeaux ..... 


L’Aquitaine devenue anglaise, le commerce fluvial sur la Dordogne jusqu’à Bordeaux, puis maritime au départ du port de Bordeaux favorise le développement de la culture de la vigne pour produire le « claret », vin rouge clair dont les Anglais sont friands. La ville de Libourne[5], dès sa fondation en 1270, est un moyen, pour les Anglais, de percevoir des droits ou coutumes sur les vins qui descendent la Dordogne et surtout ceux de Saint-Émilion.

On ne peut alors que s’interroger sur le lien d’Élie Pausat[6], trois siècles et demi plus tard, avec les Pausat habitant les villages proches de Libourne de Vayres et Arvayres et dont les professions étaient justement celles de batelier, marin, constructeur de bateau, assurant le transport, entre autres, du vin de cette région. 

Si ce lien de parenté est avéré, on peut supposer que ces Pausat font partie de sa descendance et donc, que ce berceau est plus ancien que ce qui avait été évoqué dans plusieurs articles[7] de ce blog. Si la migration de quelques Pausat du Limousin vers la Gironde a vraiment eu lieu, celle-ci est survenue avant le XIIIe siècle (avant la présence d’Élie Pausat en 1255) et, a priori, après la création des surnoms vers le XIIe siècle (la probabilité de l’émergence simultanée de notre patronyme aux deux extrémités de la voie navigable de la Dordogne, sans aucun lien entre eux, étant faible).

Mais tout ceci reste malheureusement une hypothèse invérifiable. Comme il est regrettable que la tenue des registres d’état civil[8] n’ait pas été obligatoire depuis la survenue des surnoms !


[1] Le 21 mars 1152, l'annulation du mariage fut prononcée lors du Second concile de Beaugency
[2] Le 18 mai 1152, huit semaines après l'annulation de son premier mariage, elle épouse à Poitiers le futur roi d'Angleterre, d'une dizaine d'années son cadet et qui a le même degré de parenté avec elle que Louis VII. 
[3] Après le traité de Paris de 1259, le duché d'Aquitaine a pris le nom de duché de Guyenne, terme désignant alors l'ensemble des possessions françaises du roi d'Angleterre.
[4] Si un érudit en latin du Moyen-Age lit ces lignes, je serai très heureux de bénéficier de son aide pour corriger d’éventuelles erreurs, merci d’avance. 
[5] À l'époque de sa fondation, la vocation de Libourne était celle d'un port maritime pour le commerce du vin et fluvial pour le commerce du bois, ultime destination des gabares descendant la Dordogne chargées, entre autres, de bois de noisetier destiné aux vignobles.
[6] Il se trouve que dans tous les Pauzat répertoriés à ce jour, il y en a très peu portant ce prénom, dont la plupart sont originaires de Guyenne et du Limousin.
[7] Les premiers signes d’existence de Pausat vivant à Vayres et Arvayres datent de 1650 environ, voir les articles : « Les bateliers de La Dordogne » de 2010 et « Chronique des Pausat de l'Entre-deux-Mers » de 2012 qui leur sont dédiés. D’ailleurs un individu recensé à Vayres en 1746 se nomme Élie Pausat !
[8] En 1539, François Ier promulgue l'ordonnance de Villers-Cotterêts. Celle-ci rend obligatoire la tenue de registres d'état civil. Cette tâche est confiée aux curés, le Clergé constituant la seule « administration » présente dans tout le royaume.