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7 mars 2021

Les PAUSAT en armes du berceau Languedoc – descendance de Germain PAUSAT

Poursuivons la découverte des « PAUSAT en armes du berceau Languedoc ».
Après la descendance de Pierre PAUSAT dit Languedoc, relatons maintenant celle de son frère Germain PAUSAT.

Rappelons que cet article fait suite à ceux publiés antérieurement sur ce thème :
    Article du 14/07/2020 : Préambule
    Article du 15/07/2020 : Pierre PAUSAT dit Languedoc.
    Article du 19/10/2020 : Henry PAUSAT
    Article du 27/01/2021 : les enfants de Henry PAUSAT

Nous évoquerons le parcours militaire de deux des fils de Germain PAUZAT : François (n°1432) et Jean Jacques (n°1437), puis celui éphémère de leur neveu François (n°65).


François PAUSAT (n°1432)

Il naît à Castelnaudary - paroisse Saint-Michel le 15/05/1736, fils de Germain PAUSAT (brassier) et de Jeanne PECH. Les deux enfants qui l’ont précédé étant décédés en bas âge, il est alors l’aîné de cette fratrie.


Acte de baptême de François PAUSAT

On peut donc imaginer qu’influencé par les récits de ses oncles Noël et Pierre, il n’eut pas trop de réticences à se laisser convaincre par les campagnes de recrutement organisées par les autorités militaires cherchant, à cette époque, à enrôler le maximum d’hommes en âge de combattre.
Quelques jours avant ses 20 ans, il décida donc d’abandonner son apprentissage chez un serrurier pour s’engager à son tour le 2 mars 1756 pour une période de 6 ans dans le régiment d’infanterie Royal Comtois[1].
Lors de son affectation, on lui attribua un surnom[2], comme ceci était l’usage. Ce fut celui de La Lime, en rapport à son métier.
On sait aussi, grâce au registre de contrôle d’enrôlement de son régiment, qu’il mesurait[3] :
« 5 pieds/2 pouces/4 lignes, qu’il avait les cheveux et les sourcils châtains, les yeux gris-bleu, le visage rond et le nez bien tiré, la physionomie avenante » !
Mais dix ans plus tard, sur un autre registre, il y est précisé qu’il a le « visage basané et une bouche médiocre » !
 


Le 23/07/1760, nommé sergent, il est muté dans une autre compagnie pour un nouvel engagement qui prend fin le 16/09/1766 « par ancienneté », il a 31 ans. Notons alors que son régiment était basé à Perpignan et devait partir le mois suivant pour Collioure et Montlouis.
Suit une période durant laquelle on ignore s’il est revenu à la vie civile à Castelnaudary, mais un an et demi plus tard, le 01/03/1768, on le retrouve dans ce même régiment comme fourrier[4], c’est-à-dire pour en assurer l’intendance.



À partir de cette date, on ignore quand il quitta définitivement l’armée et s’il s’est marié et installé définitivement à Castelnaudary pour y vivre une retraite paisible.

Contexte historique
En 1756, quelques jours après son premier engagement, la France entre en guerre avec l’Angleterre et la Prusse. Il s’agit de la guerre de Sept Ans qui prendra fin au traité de Paris, le 10/02/1763.
Voici deux textes faisant référence à la participation du régiment d’infanterie Royal Comtois à ce conflit[5] :
« en 1756, le régiment participe à l'expédition de Minorque, puis à la reddition de l'ile, il rentre en France où il est chargé de la défense des côtes de Flandres, toutefois un certain nombre de volontaires du régiment servent en Allemagne ».
Au nord de La Hollande : « Le comte de Muret capitaine au régiment Royal Comtois, ayant avec lui 160 volontaires de son régiment, 60 volontaires du régiment de hussards de Turpin et une pièce de canon est attaqué le 29 décembre 1759 près de Winterwitten[6] par un corps de 400 hussards de Luckner, 100 cavaliers de divers régiments, 400 hommes d'infanterie et 2 pièces de canon. Dans les relations de l'époque, ces volontaires sont parfois appelés volontaires de Muret les faisant assimiler à des troupes légères
».
On sait qu’en 1762, lors de la réorganisation des corps d'infanterie français, le régiment conserve ses deux bataillons et est affecté au service de la Marine et des Colonies et à la garde des ports dans le royaume.


Jean Jacques PAUSAT (n°1437)

Jean Jacques est le petit dernier des enfants de Germain PAUSAT. Il naît le 7 avril 1747 à Castelnaudary et quand son grand frère François part à l’armée, il a 9 ans.
Dès ses 20 ans, il s’engage à son tour le 14 septembre 1767 dans le même régiment.


Acte de baptême de Jean Jacques PAUSAT

Ils se retrouvent donc ensemble, comme on peut le voir aussi sur le registre plus haut, où l’on peut lire que le surnom qui lui est lui attribué est Tranquille. Sur un autre registre, on apprend que sa taille est d’environ 1,72 m, « ses cheveux sont châtain clair, les yeux roux mêlés de gris[7], le nez pointu et la bouche médiocre (lui aussi !), le visage et le menton long ».



Quand son frère change de compagnie en mars 1768 pour devenir fourrier, il rejoint cette dernière quelques mois plus tard. Il restera sans doute dans celle-ci jusqu’au départ de son frère.
Plus tard, il devient caporal le 1er mars 1775 à 29 ans, puis devient sergent la même année après s’être réengagé le 14 juillet 1775 pour 8 ans. Il abandonne alors son surnom pour prendre celui de son patronyme.
À la fin de ce contrat, il sera congédié le 28 février 1784 à l’âge de 37 ans.
Comme pour son frère François, on ignore ce qu’il fit, une fois revenu à la vie civile.

Contexte historique
Comme on l’a vu pour son frère, leur compagnie est chargée de surveiller les « ports du royaume ». Durant sa présence dans l’armée, il restera donc en France en suivant les pérégrinations de son régiment de la fin du règne de Louis XV qui décède en 1774 jusqu’au 10 premières années de celui de Louis XVI.
Notons que durant cette période, des volontaires français, conduits par le marquis de La Fayette, participent à la guerre d’indépendance américaine (1778-1783).


François PAUSAT (n°65)

Fils d’Antoine PAUZAT (n°1435) et de Claudine X, il naît à Castelnaudary le 29/06/1773, étant l’aîné d’une fratrie de 9 enfants. Son père, contrairement à ses frères que nous venons d’évoquer, n’aura pas choisi la carrière militaire et ne quittera pas sa ville natale où il exercera le métier de brassier.
Sur son acte de baptême, on peut lire les prénoms François, Louis et Élisabeth, la postérité ne retiendra que le premier.
 

Acte de baptême de François PAUZAT

Le 13 janvier 1791, à l’âge de 18 ans, il s’engage dans l’armée au 16e Régiment d’Infanterie Agenois basé à l’île d’Oléron.
Sur le registre de contrôle d’enrôlement de son régiment, il est indiqué qu’il a « les sourcils et les cheveux châtains, les yeux roux, petits, le nez bien fait, la bouche moyenne, sa taille est de 5 pieds/2 pouces/8 lignes » (environ 1,70 m).

Si le 1er bataillon de ce régiment part l’année suivante dans l’armée du Nord, le second, dans lequel il est affecté, embarquera pour Saint-Domingue dont il est dit : 
« Au mois de juin 1791, le 2e bataillon partit pour Saint-Domingue, d'où il ne revint en 1794 que trois officiers et vingt-trois hommes ». Il est ajouté : « Ce bataillon participa aux batailles et combats de la Révolution haïtienne et de l'expédition de Saint-Domingue. Par la suite, les débris de ce bataillon ont été fondus dans les régiments coloniaux ».
Son sort sera alors scellé, puisqu’il décédera le 29/08/1792 à l’hôpital soit pour des raisons de santé[8], soit des suites de blessures.
Il n’avait que 19 ans !


À droite, Saint-Domingue : Haïti (ancienne colonie française), la République dominicaine (ancienne colonie espagnole)


Contexte historique
En 1789, Saint-Domingue était pour un tiers[9] une colonie française et pour les deux autres tiers une colonie espagnole. Saint-Domingue avait une population d'un demi-million d'habitants, dont à peine 25.000 blancs « citoyens majeurs et domiciliés ». Le reste était des planteurs, dont plusieurs centaines résidaient dans la métropole, dispersés entre les ports de mer, les provinces et la capitale.
En août 1791, les riches planteurs prennent les armes pour contester les idées libertaires de la Révolution française, ce qui déclenche le soulèvement général des esclaves qui rejoignirent les mulâtres dans leur opposition à ceux qui bloquaient toute tentative de réforme sur l’île et voulaient constitutionnaliser l’esclavage. Le rapport de force était le suivant : « À Saint-Domingue, près de 450.000 esclaves sont contenus par environ 30.000 blancs … »
Le 22 août, environ 1 000 blancs sont tués lors de ce soulèvement.
Le 1er novembre 1791, le 2e bataillon du 16e régiment d’Infanterie fut envoyé à Saint-Domingue dans le cadre d’une mission de pacification des troubles intérieurs. Parmi les 13 officiers qui encadraient ce régiment, 7 avaient des intérêts financiers et fonciers importants en jeu à Saint-Domingue (plantations, caféteries, sucreries, terrains …).


Commentaires

- La fin du règne de Louis XVI se termina par la Révolution française qui fit basculer l’ordre social établi depuis des siècles, ce qui eut aussi par contagion, des effets au sein même de l’armée[10], depuis les gradés majoritairement nobles jusqu’aux hommes de troupe.
Ainsi, au moment où la noblesse fuyait le pays pour se réfugier auprès des monarchies voisines, de nombreux officiers quittèrent leur régiment pour se joindre aussi à l’armée des princes fidèle à la royauté.
À ce facteur majeur, s’ajouta une instabilité spécifique aux colonies françaises provoquée par l’impact des idées égalitaires de la Révolution sur le statut des esclaves, ce qui aggrava la dissension au sein des régiments.
En septembre 1791, les soldats du 16e régiment d’Agenois se plaignirent de leurs officiers, ceux-ci ayant « émigré[11] sur les frontières du Rhin en raison de l’insubordination des soldats qui ne voulaient plus de leurs officiers aristocrates ».
À la fin de cette année, on comptabilisait 20 officiers actifs issus originairement du régiment d’Agenois ayant émigré. Cette émigration se poursuivra jusqu’en 1794.

- Le sort tragique de la 3e génération des PAUZAT : comment ne pas remarquer le triste sort commun à ces trois jeunes ayant vécu tragiquement les différentes convulsions consécutives de la Révolution française.
    Barthélemy, militaire « tué par les nègres » à la Martinique vers 1790/91.
    François Barthélemy, milicien citoyen tué à Paris le 10/08/1792 lors de l’assaut des Tuileries.
    François, militaire, mort à Saint-Domingue le 29/10/1792, soit de maladie, soit lui aussi « tué par les     nègres ».


[1] Les missions confiées à ce régiment sont des fonctions de surveillance des frontières et côtes, méditerranéennes et surtout atlantiques, pour veiller à toute velléité de débarquement de la part des Anglais.
[2] Voir l’article concernant Pierre PAUZAT dit Languedoc du 15/07/2020, note de bas de page 5
[3] environ 1,70 m, sachant que 1 pied mesurait alors 32,5 cm, 1 pouce (1 pied/12) 2,706 cm et 1 ligne (1 pouce/12) 0,275 cm.
[4] Sous-officier responsable du cantonnement des troupes et du couchage ainsi que de la distribution des vivres et des vêtements.
[5] Voir le site : http://vial.jean.free.fr/new_npi/revues_npi/34_2003/npi_3403/34_fra_inf_roycomt.htm
[6] À environ 50 km au nord d’Amsterdam
[7] Cette dénomination, propre à l’Ancien Régime, signifie qu’il a les yeux marron, sans doute un peu foncés
[8] Chaque année, dès le mois d’avril, l’épidémie de fièvre jaune endémique sévit de nouveau, touchant principalement les nouveaux arrivants n’ayant pas acquis encore l’immunité des autochtones. C’est ainsi que plus tard en 1801, le corps expéditionnaire envoyé par le Premier Consul Bonaparte à Saint-Domingue sera en partie décimé par cette maladie.
[9] Actuellement Haïti
[10] Voir le Site SABRETACHE de la Société d’Études d’Histoire Militaire : le régiment Agenois au cœur des révolutions transatlantiques (1778-1830) - volume 1 (pages 220 et svtes) :
https://lasabretache.fr/wp-content/uploads/2020/06/VOLUME_01_de_Mauraige_mdp.pdf
[11] Émigrés : ceux, opposés à la Révolution française, ayant rejoint « l’armée des princes » qui stationnait à la frontière (Belgique, Luxembourg, Allemagne)