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15 juillet 2021

Vie « ordinaire » d’un Pauzat en Limousin, au début du 19e siècle.

Nous sommes en 1808 au moment de l’épopée napoléonienne qui sera considérée plus tard comme l’apogée de l’Empire.

Au cœur du Limousin, au sud de la ville de Limoges, Pierre PAUZAT et sa femme[1] Marie Marguerite FLEURAT, un couple de cultivateurs résidant au village de La Rousseille[2] près de La Meyze, attendent la naissance de leur 3e enfant.

Les deux premiers, Pierre et Élie, nés respectivement en 1806 et 1807, sont décédés quelques jours après leurs naissances. Quel sera le sort de celui à venir ?

Heureusement, le 1er octobre 1808 naît sans problème un garçon qu’ils nommeront Jean[3]. Il vivra assez longtemps pour que nous puissions en conter l’histoire. C’est donc à lui que nous consacrerons cet article.


Jean ne connaîtra pratiquement pas son père exerçant le métier de charpentier qui décèdera en mars 1810, moins de deux années après sa naissance. Il est vraisemblable que sa mère soit alors retournée vivre dans son village natal à Gorsas, commune de Rilhac-Lastours où elle décédera. Jean serait donc resté avec elle jusqu’à son adolescence, puis en âge de travailler, il trouve un emploi comme domestique dans la commune voisine du Châlard[4].

Au décès de sa mère[5] en janvier 1829, il a 21 ans et se retrouve donc seul. Signalons tout de suite qu’il n’a pas la majorité matrimoniale, celle-ci étant fixée alors à 25 ans. Il a donc besoin de l’autorisation d’un tuteur pour se marier.

Or un mois plus tard, le 8 février à Ladignac, il s’engage par promesse de mariage[6] à épouser une jeune femme âgée de 20 ans, Jeanne DESCHAMPS[7]. Cette démarche semble naturelle si l’on considère que dans sa situation, il cherche sans doute à « prendre femme ».

Cependant, une semaine plus tard, son comportement devient insolite quand il signe à la même mairie une seconde promesse de mariage[8] avec une autre personne. Que s’est-il donc passé ?

Dans un premier temps, il semble qu’un contretemps fortuit lui offre un prétexte. Il s’agit en fait d’une procédure administrative à remplir au préalable par les parents de la promise pour rectifier l’acte de naissance de leur fille, où l’on a découvert la présence d’une erreur concernant l’identité de la mère. Mais, ceci ne justifie pas qu’il renonce si vite à son premier engagement. Quel aurait pu être la raison de ce revirement ?

Brièvement, rappelons qu’à cette époque, dans les campagnes, fréquenter une jeune fille n’était pas sans conséquence, dès lors que la liaison était connue de tout le voisinage. Pour les plus anciens d’entre nous, souvenons-nous du film « Fanfan la Tulipe » qui se déroule seulement quelques années avant ces faits, où dans la première scène, le héros[9], fuyant la famille de sa bien-aimée du jour qui le poursuit pour le marier de force, s’engage dans l’armée pour échapper à son sort.

Dans le cas de Jean, étant donné qu’il n’y a plus de recruteurs parcourant les campagnes, les guerres napoléoniennes[10] étant terminées, il lui faudrait trouver une occasion. Ce contretemps était-il le bienvenu ?

Donc, Jean bénéficiant fortuitement du retard induit par la procédure administrative que les parents doivent entreprendre, n’attends pas le règlement de ce litige, sachant qu’il ne risque aucune sanction administrative pour une rupture de fiançailles[11]. Ainsi, une semaine plus tard, il s’engage donc dans une seconde promesse de mariage[12], avec une habitante du même village. Il s’agit de Marguerite MARSAUD, âgée de 25 ans !

Notons le hasard de la vie qui donne à celle-ci la même opportunité que celle dont il a profité lui-même. En effet, ayant besoin de l’autorisation d’un tuteur et devra lui aussi engager une procédure administrative pour que celui-ci lui soit désigné.

Pour se faire, le 25 février de la même année est organisé une « réunion des Assemblées des parents[13], amis et voisins » où Jean comparait « en état de journalier, chez le Sieur PASSERIEUX, propriétaire demeurant au bourg du CHALARD[14] qui expose qu’au décès de ses parents, il ne fut point pourvu d’un tuteur et reste encore aujourd’hui en âge de minorité ».

Le tuteur, un dénommé Bernard PESCAT ayant été désigné, cette formalité est donc remplie et sa seconde fiancée n’ayant pas changé d’avis, ils purent se marier le 2 mars 1829.



Photos anciennes du mariage en Limousin et promesse de mariage avec Marguerite MARSAUD

….. à suivre

prochain article : Vie « ordinaire » d’un Pauzat en Limousin, au début du 19e siècle (suite)

 

Note : si vous le souhaitez, vous pouvez visualiser les actes cités dans cet article en consultant directement les Archives Départementales de la Haute-Vienne[15]: http://archives.haute-vienne.fr/Sélectionner : fonds numérisés/État civil, puis indiquer le nom de la commune, l’année et le type d’acte.

Les n° de page sont indiqués ci-dessous.

[1] Notons qu’elle est sa troisième épouse.
[2] Lieu-dit dont la dénomination est toujours actuelle au sud-ouest du village La Meyze
[3]Acte de naissance de Jean PAUSAT : AD 87- La Meyze-1808-page 42/183
[4] À la Révolution française, la paroisse devient une commune mais fusionne presque aussitôt avec celle de Ladignac-le-Long. Ce n'est qu'en 1867 que Le Chalard redeviendra une commune indépendante.
[5] Acte de décès de Marie FLEURAT : AD 87- Rilhac-Lastours-1829-page 91/151
[6] Les promesses de mariage, affichées auparavant à l'église, puis à la mairie après la Révolution, sont les bans. L'article 63 du Code civil en1804 demande deux publications de mariage devant la porte de la mairie.
[7] Promesse de mariage avec Jeanne DESCHAMPS : AD 87-Ladignac-1829-page 118/140
[8] Promesse de mariage avec Marguerite MARSAUD : AD 87-Ladignac-1829-page 119/140
[9] Dans la première version, incarné par l’acteur Gérard PHILIPPE
[10] En 1829, Napoléon est décédé depuis 8 ans et la France est en paix sous la monarchie restaurée, Charles X est au pouvoir.
[11] ce qui est normal, sinon cela équivaudrait à ce que l'on soit déjà marié avant de l'être.
[12] Promesse de mariage avec Marguerite MARSAUD : AD 87- Ladignac-1829-page 119/140
[13] Les seuls parents susceptibles de venir assister à cette assemblée n’ont pas pu se déplacer, il s’agit de Jean et François PAUSAT, qui sont, a priori, ses demi-frères, nés d’un mariage antérieur de leur père.
[14] CR : AD 87- Ladignac-1829, page 111/140
[15] Accès aux Archives Départementales de la Haute-Vienne : http://archives.haute-vienne.fr/