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8 octobre 2017

À la découverte de nos voisins patronymiques

En dépouillant les données généalogiques de nos ancêtres, j’ai parfois rencontré des individus portant un patronyme proche orthographiquement du nôtre.
Ainsi, il existe des CAUZAT, DAUZAT, FAUZAT, …. TAUZAT.
La similitude de ces patronymes est-elle liée à une évolution accidentelle de l’écriture d’un surnom déjà existant, ou s’agit-il d’appellations distinctes ayant chacune leur propre origine linguistique ?
Sans vouloir prétendre répondre scrupuleusement à cette question, je vous propose de partir à la découverte des informations qui pourraient nous éclairer sur ce sujet.

Préambule
Tout d’abord, je relaterai cette anecdote :
C’est adolescent que, la première fois, j’ai découvert cette ressemblance avec mon nom.
Il m’est revenu à la mémoire, que j’avais lu sur un journal, qu’un dénommé DAUZAT proposait de fournir le sens étymologique du nom de chaque personne qui lui en ferait la demande. Ma curiosité éveillée par son nom voisin du mien, je lui ai écrit et j’eus pour réponse que le patronyme PAUZAT signifie : « gros » (sic).
Ce fut ainsi ma première tentative pour connaître l’origine de mon nom et ce n’est que beaucoup plus tard que j’ai su que celui-ci était initialement un surnom[1] emprunté à la langue occitane, nos ancêtres étant tous originaires d’Occitanie.
Remarque : Je suppose que cette personne devait être Albert DAUZAT[2] qui rédigea, entre autres, un ouvrage sur l’onomastique[3] : «Dictionnaire étymologique des noms de famille et prénoms de France, Larousse, 1951».

Rappelons que notre nom de famille est l’héritage du surnom donné à nos ancêtres ayant vécu vers les 10/11e siècles, époques où l’augmentation de la population a fait se côtoyer de plus en plus d’individus portant le même prénom, celui-ci étant le plus souvent celui du saint de la paroisse. Cette situation a poussé les habitants d’un même village à ajouter un surnom au prénom de chaque individu pour les différencier.
Cette coutume est devenue progressivement officielle quand les naissances, les mariages et les sépultures furent systématiquement répertoriés par l’Église, à partir de 1550.

« Authenticité » d’un patronyme
À mon avis, pour qu’un patronyme puisse se revendiquer comme étant la continuité d’un surnom, il doit satisfaire au moins deux critères :
Premier critère : il doit donc avoir existé antérieurement en tant que surnom, exprimé dans la langue en usage dans sa région, ici, l’occitan[4].
Second critère : Il est préférable que l’usage de ce surnom corresponde à un besoin bien antérieur à sa première « officialisation » dans les actes paroissiaux. En effet, son ancienneté implique ainsi l’existence de plusieurs générations d’individus identifiés avec celui-ci et écarte l’hypothèse d’une erreur littérale au moment des premières rédactions des actes.

Allons à la découverte de nos voisins patronymiques[5]

CAUSAT /CAUZAT :
CAUZAT : très peu d’individus, situés dans l’Allier
CAUSAC : comme ci-dessus, on en trouve en Gironde et les Pyrénées-Orientales, mais aussi en Lozère.
CAUZAC : très peu d’individus en Loire-Atlantique, la Gironde et l’Hérault.
Remarque :
1- On remarque ces noms en Haute-Garonne vers 1634 et dans les Pyrénées orientales dès 1610 (Canet-en-Roussillon, Narbonne, etc.), et ponctuellement en Allier et en Gironde.
2-Cette orthographe est rare, seulement moins de 100 individus répertoriés depuis le Moyen-âge à nos jours, mais ce nombre est beaucoup plus important en prenant en compte les patronymes CAHUSAC / CAHUZAC plus répandus.
Étymologie : aucune origine connue pour ce patronyme, sauf pour Cahuzac qui serait un nom de famille, représentant un nom de localité ancienne de l’Aude.


DAUZAT :
DAUZAT : un grand nombre d’individus, localisés en Auvergne, surtout dans le Puy-de-Dôme, mais une exception, ci-dessous, en Haute-Garonne

DAUSAT : quelques individus dans les Pyrénées Atlantique, la Dordogne, et le Puy-de-Dôme
DAUSAC : On trouve aussi des individus sous cette forme, les plus anciens étant dans le Vaucluse (en 1578), les autres étant localisés dans les Pyrénées-Atlantiques, le Lot-et-Garonne, le Tarn, la Dordogne, le Gard, l’Aude, le Puy-de-Dôme et curieusement en Vienne, alors que ce territoire se situe hors l’Occitanie.
Curiosités : présences d’un DAUSAC
-        En 1700, au Québec :
    
-        En 1368, dans le Gard :
                 
DAUZAC : On trouve aussi des individus DAUZAC, dans le Tarn, le Tarn-et-Garonne et le Lot-et-GaronneÉtymologie : Ce nom est celui d'une localité du département du Puy-de-Dôme. L'étymologie de ce toponyme serait indo-européenne, il provient de l'agglutination du nom de personne gallo-romain davisius et du suffixe acum qui signifie : la terre de davisius.
                 
Paysage à DAUZAT-sur-Vodable en Puy-de-Dôme, et le domaine viticole DAUZAC en Gironde

GAUZAT :
GAUZAT : peu d’individus, ils se situent principalement en Allier, puis en Ariège, Yonne, Dordogne, et un à Nîmes en 1616 ;
GAUSAT : un seul individu dans l’Allier (décès de Gilberte GAUSAT)
GAUZAC : quelques individus portant le nom de GAUSAC, situés en Lozère et dans le Tarn.
Étymologie : a priori, venant du verbe oser (gausar, ausar), mais aucun GAUSAT recensé à ce jour avec la terminaison en SAT, alors que c’est cette orthographe qui devrait précéder les autres.
JAUZAT :
JAUZAT : quelques individus recensés dans le Puy-de-Dôme, le Var et un peu plus en Corrèze à des dates proches de la fin du 17e siècle
JAUSAT : on trouve des individus seulement dans le Var et la Corrèze,
JAUZAC / JAUSAC : il y a beaucoup plus d’individus portant ces patronymes (un peu moins avec l’écriture JAUSAC). Ces derniers sont localisés en Corrèze, Dordogne et le Lot.
Étymologie : ce nom désignerait celui qui est originaire de Jauzac, nom de hameaux à Chasteau (19), Terroux (46) et Fumel (47). Il est dit que « l’origine de ces hameaux viendrait du nom du domaine Gaudius, nom de personne latin ».
Musique médiévale et le prêtre chanoine Pierre LAUSAC en 1499 à Valabrègue dans le Gard

LAUZAT :
LAUSAT : très peu, un individu dans le Gers en 1627, un autre en 1651 dans les Pyrénées-Orientales et un troisième en Gironde en 1673, puis dans le Tarn-et-Garonne et le Vaucluse
LAUZAT : beaucoup plus nombreux, on en trouve dès 1519 dans le Tarn-et-Garonne, puis en Aveyron vers 1525, et aussi dans l’Allier, curieusement la terminaison en ZAT semble précéder celle en SAT.
LAUSAC : quelques individus dès 1500 dans le Gard, la Haute-Garonne, la Corrèze, la Drôme et le Lot
LAUZAC : une fois de plus, on trouve la terminaison en ZAC antérieure à celle en SAC, le premier est en 1410, lieu inconnu, puis dans le Gard, le Lot et l’Ardèche
Étymologie : pas d’explication à ce jour, signalons des lieux-dits Lausa et Lauza en Gascogne et Provence (signifiant : « pierre plate et mince, dalle, roche schisteuse »).



MAUZAT :
MAUZAT : ils sont localisés en Auvergne (Allier, Puy-de-Dôme), Dordogne et Limousin (Corrèze), ils vécurent en voisin des PAUZAT, parfois dans les mêmes communes.
MAUSAT : on en trouve essentiellement dans l’Allier
MAUSAC : existe aussi dans les Hautes-Pyrénées, le Cantal
MAUZAC : idem que ci-dessus, plus le Puy-de-Dôme, la Haute-Loire et la Vienne et (voir les photos ci-dessous) :
-       -  Il existe une commune Mauzac dans la Haute-Garonne, une autre Mauzac-et-Grand-Castang en Dordogne (anciennement Mauzac, avant d’être rattaché à Grand-Castang ), près de Bergerac.
-        - Depuis 1525, on trouve le nom de Mauzac à Gaillac dans le Tarn, pour identifier un vignoble nommé « Mauzac noir ».
Étymologie : voir un extrait d’un lexique occitan-français, ci-dessous


SAUZAT :
SAUZAT : quelques individus recensés en Charente-Maritime, l’Allier, la Dordogne, la Haute-Vienne, la Drôme, l’Indre, le Vaucluse, les Pyrénées-Orientales et les Deux-Sèvres.
Curiosité : un SAUZAT qui se marie en Australie en 1529
SAUSAT : on en trouve en Haute-Vienne, dans la Drôme, en Charente-Maritime, le Cher, l’Indre, l’Ardèche et le Vaucluse, ainsi qu’un mariage dans l’Hérault en 1670
SAUSAC : recensés dans la Drôme, l’Ardèche, l’Hérault, le Vaucluse, l’Ariège, en Charente-Maritime et en Haute-Loire
Curiosité : une Alix de SAUSAC dite des Ollières, habitant en Ardèche à St-Cierge-sous-le-Cheylard en 1448.
SAUZAC : très peu d’individus, ils sont situés en Ardèche, le Gard, la Charente-Maritime.
Étymologie : le nom SAUZAT est fréquent dans l'Isère et en Provence, le nom désigne celui qui habite un lieu-dit (le) Sauze (= le saule). A noter enfin des noms qui devraient être des diminutifs, mais qui peuvent aussi évoquer un bois de saules comme Sauzat (87).

Dans le tableau de droite, ci-dessus, sont récapitulées les concentrations les plus importantes des patronymes examinés dans cet article. On peut remarquer, comme pour les PAUSAT/PAUZAT[6], une implantation de ces patronymes le long des rives de la Dordogne, du Massif central jusqu’à la mer.

Enfin, pour les formes en : FAUZAT, HAUZAT, NAUZAT, QAUZAT, RAUZAT, TAUZAT, VAUZAT, on peut considérer qu’il n’existe pas de rapport entre elles et la langue occitane. De plus, leur nombre est si faible, qu’à l’évidence, leur présence est probablement due à un « accident de parcours » lors de la transcription orale de ces derniers sous la forme littérale.

Pour conclure, je n’ai pas trouvé de preuve de l’existence d’un lien entre les différentes formes de ces patronymes et le nôtre.
Le seul point qui leur est commun est celui d’être seulement présents en Occitanie. Chaque patronyme y a donc son parcours personnel, dont nous ne connaîtrons sans doute jamais l’origine.



[1] Le patronyme Pauzat était initialement écrit Pausat, participe passé du verbe pausar, ce dernier, écrit différemment selon les circonstances et les régions : AU devenant OU ou simplement O, SAT devenant ZAT, et AT alternant avec AC.
voir les articles des 14 septembre 2010 et 01 mars 2011.
[2] Linguistique français (1877-1955), pionnier dans le domaine de l’anthroponymie (étude des noms propres de personne) et de la toponymie (étude des noms propres de lieu).
[3] L'onomastique est une branche de la lexicologie qui a pour objet l'étude des noms propres : leur étymologie, leur formation, leur usage à travers les langues et les sociétés.
[4] Ou éventuellement, une langue plus ancienne ayant été en usage dans ce territoire, par exemple pour un nom de lieu.
[5] La crédibilité des informations indiquées ci-dessous est tributaire de l’état d’avancement des informations recueillies dans les sites de généalogie consultés.
[6] Voir l’article du 18/10/2010 : Les bateliers de la Dordogne

27 août 2017

Quand nos ancêtres se mariaient très jeunes.

Durant l’Ancien Régime, alors que l’âge du mariage se situait majoritairement après 25 ans, certains de nos ancêtres se mariaient beaucoup plus jeunes. Leurs actes de mariage indiquent qu’ils se mariaient parfois à des âges qui choqueraient aujourd’hui notre société.
Ainsi, si l’Histoire nous a appris que nos monarques se mariaient parfois très jeunes pour des raisons politiques, nous trouvons aussi pour nos ancêtres des cas similaires, mais pour quelles raisons ?

Les juridictions en vigueur
Durant l’Ancien Régime jusqu’à la Révolution, l’Église, selon le Droit canonique, fixe l’âge nubile, c’est-à-dire l’état d’une personne ayant atteint la puberté et donc l’âge de procréer, à 12 ans pour les filles et 14 ans pour les garçons.
Notons qu’en Normandie existait la coutume fixant à 20 ans le même âge pour les filles et les garçons.
Remarque : Ne pas confondre l’âge nubile avec la majorité matrimoniale qui désigne l'âge où un individu peut se marier sans l'accord de ses parents ou tuteurs légaux. Cet âge est fixé à 25 ans pour les deux sexes par la Législation royale, l’Ordonnance de Blois de 1579.

La pratique dominante
Contrairement à ce que l’on pourrait penser, nos ancêtres se mariaient majoritairement assez tard, après l’âge de 20 ans :
L’extrait de l’article « La population française sous l'Ancien Régime »[1] , nous explique les raisons qui poussaient nos ancêtres à agir ainsi :
« En France, on se marie tard : 27 ou 28 ans en moyenne pour les garçons, 25 ou 26 pour les filles. On distingue deux causes principales à cette pratique :
- d'une part, le souci d'éviter une descendance trop nombreuse afin de ne pas diviser l'héritage
- et d'autre part, l'attente fréquente de la mort des parents, libérant des biens et des terres.

Le mariage précoce, une exception ?
Des recherches récentes montrent, par contre, que le mariage précoce existait en France, sous l’Ancien Régime. Citons :
« Le mariage de très jeunes filles n’avait pas totalement disparu en France sous l’Ancien Régime : à Bourg-en-Bresse, on compte beaucoup d’adolescentes parmi les mariées du xvie siècle, tout comme en Lorraine ou en Bretagne au xviie siècle …
À Bordeaux, quelques familles des élites recourent aussi au mariage de très jeunes filles âgées de moins de 15 ans ».
Le fait de marier de très jeunes filles, notamment celles âgées de moins de 15 ans, reste donc une pratique, quoique marginale.

Un exemple de mariage précoce chez les PAUZAT
L’exemple ci-dessous concerne le cas de Anne PAUZAT (n°951) vivant à Bussière-Galant en Limousin : elle est née le 27/11/1748 et se marie le 22/02/1762, donc à l’âge de 13 ans et 3 mois.


On trouve d’autres cas semblables dans la généalogie des PAUZAT, avec une particularité, ils sont tous regroupés dans le Limousin.


Existe-t-il une raison justifiant les mariages précoces ?
Première hypothèse : en se plaçant dans le contexte de l’époque, on peut considérer que se marier jeune est une décision prenant en compte l’espérance de vie qui était très faible, de l’ordre de 40 ans en moyenne[2], pour permettre en théorie d’avoir une descendance plus nombreuse.
Toutefois, ces cas restent marginaux, car seulement 4 % des femmes se mariaient avant leurs 17 ans. De ce fait, on ne peut pas considérer qu’il y a un lien de cause à effet, entre une durée limitée de procréation s’appliquant à l’ensemble de la population, et une conséquence se limitant qu’à une minorité.

Deuxième hypothèse : L’incitation à un mariage précoce est-il lié à la survenue d’une naissance « hors mariage », celle d’un enfant dit « naturel ».
En général, si la jeune fille accouchait avant le mariage, les conséquences sociales étaient si graves qu’elles aboutissaient souvent à l’abandon du nouveau-né[3].
« Mais, rares sont les mariages de ce type qui se font sous la pression des événements, très peu de ces adolescentes étant déjà enceintes au moment de leurs noces. Toutefois, même si certaines ont pu consommer leur union avant l’administration du sacrement, beaucoup ne sont pas encore nubiles, ce qui leur évite les risques d’une grossesse prénuptiale qui serait du plus mauvais effet pour la réputation de la famille[4] ».
Notons qu’Anne PAUZAT précitée n’a pas eu d’enfants dans les mois qui suivirent, donc son mariage n’aurait pas été motivé par ce motif.

Troisième hypothèse : le contexte familial
Certaines études tendent à montrer le rôle des parents, choisissant délibérément de profiter de leur emprise sur leur jeune enfant, cherchant à sauvegarder un patrimoine et/ou une situation sociale prédominante.
Dans ce cas, ceci concerne surtout « les couples qui ont eu très peu d’enfants, ou seulement des filles. Il s’agit alors d’éviter la disparition complète du lignage, ou à tout le moins d’établir rapidement la fille destinée à recevoir l’essentiel du patrimoine familial pour qu’elle ait à son tour des descendants ».
Notons que les parents d’Anne PAUZAT, n’avaient que deux filles : Anne et sa sœur Jeanne (âgée de 7 ans en 1762), situation qui semble conforme à ce cas.

En conclusion, la pratique du mariage précoce durant l’Ancien Régime n’est que conjoncturelle et demeure limitée en nombre.
Si celle-ci attire notre attention de nos jours, ceci est dû au fait qu’elle existe encore dans certains pays et qu’elle est dénoncée par les Nations unies en tant qu’une atteinte aux droits de l'homme.
Rappelons qu’en France, comme dans la plupart des États membres de l’Union européenne, l’âge minimum légal du mariage[5] est de 18 ans pour les deux sexes, ceci permettant de lutter contre les mariages forcés des filles[6].


[1] Auteur : Thibault, site PHILISTO
[2] Au début du XIXe siècle, l'espérance de vie des Français n’est encore que de 36 ans !
[3] Il a été estimé « qu’environs 3 millions d’enfants illégitimes furent abandonnés en France entre la seconde moitié du 18e à la fin du 19e
[4] Il n’était pas rare que la (future) mariée soit déjà enceinte, parfois depuis de nombreux mois, au moment du mariage. Il était par contre essentiel que l’enfant naisse lorsque les époux étaient mariés. Au niveau national, les différents sondages tant au 17e qu’au 18e siècle donnent un peu plus de 10% de femmes enceintes au moment du mariage, plus de 30% dans certaines paroisses.
[5] En France, avant 2005, la précédente version de l'article 144 du Code civil napoléonien, en vigueur depuis 1804, fixait l'âge minimum du mariage à 18 ans révolus pour les hommes et à 15 ans révolus pour les femmes.
[6] L’Espagne a passé de 14 à 16 ans le minimum légal pour se marier, avec le consentement d’un juge.

2 mai 2017

Les premiers PAUZAT figurant dans la presse écrite


À l’époque actuelle, où le plus grand nombre confie sa vie privée sur les réseaux sociaux et prend immédiatement connaissance du moindre évènement survenu sur la planète, il est intéressant de se pencher sur un passé encore proche, où l’information ne dépassait pas les frontières de son voisinage.

Dans la seconde moitié du 19e siècle, l’expansion de la presse[1] a permis d’élargir le champ de diffusion de ces informations. Ainsi, pour le sauvetage d’une personne en train de se noyer, un accident de circulation ou la réussite au certificat d’études, des PAUZAT ont été cités dans leur journal régional.

Un peu plus d’un siècle plus tard, rien n’avait fondamentalement changé. Je me souviens de mon étonnement, vivant à Toulouse, de pouvoir lire de façon inopinée, dans les faits divers de La Dépêche du midi, qu’un François PAUZAT résidant en Bretagne avait tenté de se suicider. Pour la première fois, j’avais eu l’occasion de découvrir que mon patronyme existait ailleurs que dans le périmètre restreint de ma famille, mais je n’avais aucun moyen d’en savoir davantage.

De nos jours, c’est nous qui pouvons aller à la recherche de ces informations, car nous avons accès aux journaux diffusés les siècles passés, dans la mesure où ces derniers ont été numérisés et mis à disposition sur le Net. Retrouver la trace de notre patronyme est devenu possible[2]. On retrouve ainsi des faits divers qui ont concerné nos ancêtres, qu’à titre de curiosité, je donne ici quelques exemples :


- Le 9 mai 1860, au lieu d’Aixette dans la commune de Nexon (Haute-Vienne), Martial PAUZAT, meunier de profession, est victime d’un vol commis par un individu qu’il avait pris récemment à son service. Ce dernier est arrêté à Limoges et jugé en août de la même année à quatre années d’emprisonnement.
- En 1873, Louis PAUZAT participe à une course de fond consistant à un A/R entre Marseille et Avignon : 220 km parcourus pour certains en vélocipède (9 concurrents), à pied (3 piétons) et 1 cheval attelé (sic). Le départ a eu lieu à 01h du matin, le retour s’est effectué 16h plus tard, dont 2h pour dîner et se reposer !
- Au début des années 1900, on relève le vol d’un lapin !
* Á St-Yrieix (Haute-Vienne), Marie PAUZAT, âgée de 12 ans, est accusée du vol d’un lapin
* Pierre PAUZAT, 47 ans, journalier, impliqué dans cette affaire, est relaxé.
- Les victimes d’accidents : comme quoi les véhicules avec attelage ou à moteur de l’époque étaient aussi dangereux que ceux actuels :
* Le 5 mars 1890, un enfant de 14 ans, domestique du sieur POUZAT, propriétaire à La Morella (commune de Ladignac en Hte-Vienne) est écrasé par le tombereau attelé de deux vaches qu’il conduisait.
* Le 18 octobre 1891, son cheval ayant pris peur, un employé de M. POUZAT de Toulouse a la clavicule gauche cassée par la roue de l’attelage.
* Le 28 septembre 1901 à Paris (Saint-Ouen M. POUZAT, âgé de 45 ans, circulant en bicyclette, a été renversé mortellement par un camion de la Compagnie des wagons-lits.
* En 1917 à Ladignac, Gustave PAUZAT, revenant de la chasse, décharge accidentellement son fusil sur son pied gauche …
* En 1939 à Limoges, Jean PAUZAT, âgé de 80 ans et balayeur municipal, se fait renversé par une voiture attelée d’un cheval et en décède quelque temps après.
- Enfin quelques individus signalés pour leur comportement ou leur nomination :
* Le 15 février 1893, M. Jean-Basile PAUZAT, fondés de pouvoir de recette particulière, est nommé percepteur à Samazan (Lot-et-Garonne), source : L’Express du Midi
* Le 29 juillet 1907, Léon-Armand-Eugène-Paul-Émile PAUZAT, brigadier au 29e régiment de dragons à Grisy-sur-Seine a porté secours à un de ses camarades en danger de se noyer.
* M. PAUZAT, mécanicien principal de 2e classe du port de Rochefort, est « autorisé à servir temporairement à Toulon, après son débarquement du contre des torpilleurs d’Oran », source : L’Écho d’Alger du 02/04/1913
* Le 26 juillet 1906, Léonard PAUZAT, dessinateur, reçoit le 2e prix de la société d’émulation de Brest
Etc.

Voici donc quelques témoignages mentionnant nos ancêtres dans ce qui était, à leur époque, le seul média auquel ils avaient accès. Notre curiosité restera insatisfaite, du fait de leur nombre limité. Cet échantillonnage nous donne cependant un aperçu de la société d’alors, de son quotidien et de l’inattendu, ce que l’on nomme aujourd’hui « les faits divers », et enfin des débuts du journalisme, sa manière d’en rendre compte et aussi, à l’occasion, d’y glisser un avis moralisateur pour « éduquer » le bon peuple.
Par contre, quel jugement porteront les générations futures sur notre quotidien, quand ils se pencheront sur nos faits divers, nos commentaires et notre besoin irrésistible d’y figurer. Seront-ils tentés d’y jeter un regard ?


[1] Dès 1845, l’invention de la rotative permet d'imprimer des dizaines de milliers de quotidiens en une nuit et de faire baisser le coût unitaire de l'édition (la feuille de chou n'est plus vendue simplement sur abonnement, mais en kiosque ou à la criée, au prix de 5 centimes au lieu de 15 à 20 centimes précédemment).
[2] Par des logiciels de reconnaissance de caractères

14 mars 2017

Les PAUSAT marguilliers

En lisant les registres paroissiaux de nos ancêtres ayant vécu au village de Saint-Cernin-de-Labarde, au sud de Bergerac, j’ai eu la surprise de découvrir un mot que j’ignorais et qui servait de qualificatif à certains individus, après leurs nom et prénom. Il s’agit du mot : « marguillier », était-ce un métier ?

ci-dessus : Antoine PAUSAT, tisserand et marguillier de la paroisse

Après recherches, j’ai appris qu’il s’agissait d’une fonction confiée à certaines personnes pour administrer le temporel[1] de la paroisse de leur village. De quoi s’agit-il exactement ?
Primitivement, ce mot désignait celui qui gérait le registre sur lequel était inscrit le nom de chaque personne qui recevait de l’église, soit des prébendes[2], soit des aumônes.

Ce marguillier était l’un des membres du clergé régulier ou séculier. Il est aussi question, à l’époque des Mérovingiens, de marguilliers qui recueillaient les enfants exposés aux portes des églises et demandaient publiquement au peuple si quelqu’un voulait s’en charger. On donnait encore le nom de marguillier à celui qui assistait le sacristain, par exemple pour sonner les cloches, allumer et éteindre les cierges, ouvrir et fermer les portes de l’église.
Pendant de longs siècles, l'administration des biens ecclésiastiques est restée entièrement aux mains du clergé, sous le contrôle de l’Évêque. C'est au 9e siècle que le nom de marguilliers, "matricularii", fut donné à des officiers de l'église. Dès cette époque, le partage des dîmes devait se faire en présence de deux ou trois paroissiens. C'était le premier pas qui mènera les laïcs à participer directement à l'administration des biens paroissiaux. Je cite :
« Sous l'Ancien Régime, cette fonction avait pour but de décharger les curés d'une administration à laquelle ils étaient souvent mal préparés et d'une responsabilité quelquefois lourde et à laquelle on n'était pas fâché de substituer celle des laïcs ».
Outre les biens propres de l’église qui pouvaient être mis en péril, il y avait aussi l’entretien quotidien du lieu, citons :

« les clôtures autour de l’église étaient souvent mal entretenues, le terrain était envahi par les bestiaux qui venaient y paître, les femmes y étendaient leur linge ; on y déposait le bois, planches et perches nécessaires à certains travaux ». 

acte de décès de François PAUSAC, marguillier

Les marguilliers sont élus par les habitants du village, en général au moment de la grand-messe ou des vêpres. Citons :
« Le notaire, personnage éminent du village se place à la porte de l'église, il intercepte les moins rapides à se rendre à la taverne qui n'ouvre qu'à l'issue du Saint-Office, et en présence du curé et ... d'une bonne dizaine d'habitants constituant la plus saine et grande partie des habitants, les marguilliers vont être élus ».

Élu ou nommé, le marguillier est tenu a priori de savoir lire et écrire, ce qui n’était pas toujours le cas. « Ils sont nommés plus pour leur bonne volonté que pour leur connaissance de la comptabilité ou de l'écriture. Certaines nominations devaient être le fruit de la collusion de certains habitants contre tel ou tel voisin. On n'était pas trop mécontent de pouvoir se venger de la sorte. Et comme l'heureux élu ne pouvait pas refuser ! Et pourtant, leurs fonctions revêtaient théoriquement une importance capitale pour la vie religieuse ».
À gauche, tableau datant de 1897 représentant des marguilliers, à droite, un banc datant de 1755 réservé autrefois à ces derniers dans l’église de St-Ayol-de-Provins (à l’est de l’agglomération de Paris). 
exemple d'un autre François PAUSAC, marguillier qui, en 1761 à St-Cernin-de-Labarde, parraine un enfant présenté devant l'église pour être baptisé et sans doute recueilli
Ainsi, certains de nos ancêtres furent impliqués étroitement dans la gestion de la vie religieuse de leur village. La fonction de marguillier en était un symbole fort. Sa connaissance nous a permis de soulever le voile que les ans avaient tissé et de révéler un peu plus combien la religion conditionnait alors leur quotidien.




[1] Le temporel : ensemble des biens matériels de l’église
[2] Prébendes : Initialement, la ration journalière à fournir aux moines et aux ecclésiastiques, puis le sens se rétrécissant, le revenu alloué à un chanoine. La prébende fut abolie, en même temps que la dîme et autres biens du clergé, par l’Assemblée nationale constituante. Au moment où éclata la Révolution, on voyait encore plusieurs seigneurs en possession de ces espèces de prébendes. Le comte d’Armagnac en avait une dans l’église d’Auch, dont il était le premier chanoine.